La stèle de Mesha

       Un petit retour dans la salle consacrée à la Jordanie du musée du Louvre. Avec la stèle de Mesha on se retrouve à l'âge du fer.

Il s'agit d'une pierre de basalte noir, arrondie à son sommet, qui fait plus d'un mètre de hauteur. Elle a été découverte en 1868  par le révérend F. A. Klein, missionnaire allemand à Jerusalem, sur le site de Dhiban en Jordanie. Elle est couverte d'un côté d'une inscription en caractères que les chercheurs de l'époque ont identifiés comme étant de l'hébreu primitif. Elle est aujourd'hui datée des années 830-685 de notre ère.

Les circonstances de la découverte de cette pierre sont assez pittorresques. Le missionnaire signala l'existence de la stèle et le grand orientaliste Charles Clermont-Ganneau envoya depuis Jerusalem un intermédiaire arabe qui fit une copie sur place, en 1969.

Deux mois plus tard, un deuxième intermédiaire réalisa un estampage (L'estampage est une technique qui consiste à plaquer un matériel souple, comme du plâtre, sur un objet dont on veut prendre la forme ; le plâtre séché garde alors la forme qu'on lui a imprimée). Les bédouins remarquèrent les allées et venues autour de cette pierre et imaginèrent qu'elle renfermait un trésor. Ils chauffèrent la pierre et y versèrent ensuite de l'eau froide pour la casser. Clermont-Ganneau réussit à récupérer tout les morceaux et grâce aux copies qui avaient été faites, la stèle put être reconstituée.

 

Sur les rives du Jourdain, l’âge du fer correspond à l’époque de l’Ancien Testament. Après que les Pharaons égyptiens eurent régné pendant des siècles sur les villes-États de Palestine, leur domination fut menacée par la poussée des «Peuples de la Mer», déferlant par terre et par mer depuis la région égéenne.

Durant la première partie de l’âge du fer (1200-1000 av.JC.) se développèrent, à l’est du Jourdain, des dynasties «nationales» tels que celles d’Ammon et de Moab, ainsi que, plus tard, celle d’Edom dans le sud. À la même époque, les royaumes d’Israël et de Juda virent le jour à l’ouest du fleuve.

La  stèle de Mesha illustre les conflits mouvementés que se livrent ces peuples au cours de la deuxième partie de l’âge du fer (1000-520 av.JC.). Elle raconte à sa manière et en 34 lignes, la révolte victorieuse de Mesha, roi de Moab, contre le roi d'Israël Joram, le fils d'Achab et petit fils d'Omri, aux alentours de 840 avant notre ère.

Il y a un parallèle entre la stèle et la Bible, mais les deux récits ne se recoupent qu'en partie. Ils s'accordent en tous cas sur les causes du conflit et sur son issue. La bible relate l'attaque victorieuse des rois Joram et Josaphat et d'Edom, la stèle parle de victoires moabites et de conquête sur Israël. En fait, chaque récit s'attarde sur l'époque où son peuple avait l'avantage, sans faire état des éventuelles défaites. 

On a découvert, au cours des 100 dernières années, une culture écrite étonnamment riche en Syrie-Palestine. Au cours du IIe millénaire avant notre ère, plusieurs systèmes d’écriture furent inventés dans la région, en plus des systèmes étrangers, tels que le cunéiforme, qui y étaient utilisés. C’est ici que fut accomplie la percée décisive consistant à passer de systèmes complexes dotés de plusieurs centaines de signes au système le plus simple possible, un alphabet d’une vingtaine de lettres. Les langues ammonite et moabite appartiennent à la même famille que la langue hébraïque – le groupe sémitique occidental.